Leçon de vie (Petite-Patrie, Montréal, 29 juin 2017)

Bon, j’ai une répétition chez Mana, en vue du concert des profs de l’académie de musique de chambre; ce matin, nous allons pratiquer le quatuor avec piano de Schumann… Après la répétition, j’ai un rendez-vous avec Suzie sur la Rive-Sud, alors je prends l’auto…

J’arrive juste comme les deux camions de recyclage viennent de passer (ben oui, deux, un par côté de rue) dans la petite rue à sens unique où je me suis stationné la veille, pour cause de nettoyage devant chez moi. J’ai peut-être une petite chance de passer avant le camion de vidange… Si je puis faire signe au chauffeur et être vu…

Je ne sais pas s’il ne m’a pas vu intentionnellement ou accidentellement, mais il ne m’a pas vu. J’écris à Mana que je risque d’être en retard, pris comme je suis derrière ces trois mastodontes.

Et je suis le camion de proche, en voyant tout ce que mes relatifs voisins envoient à la décharge… Des montagnes de sacs, des poubelles plus que pleines, que les vidangeurs ne peuvent que renverser, des tas de trucs plus bons, des tas d’autres qui auraient peut-être pu avoir une autre vie, une imprimante (Ho! Me semble que ça ne devrait pas aller dans les déchets ordinaires, ça?! Résidus toxiques, non?), un sommier, des trucs métalliques, des branches, des déchets de construction…

…Un canapé lit convertible, qui déborde de l’arrière du camion… mais qui se retrouve écrasé comme presque rien, déchiqueté par la lame de la benne à ordures…

Comme une métaphore de nos propres existences, qui peuvent sembler solide de l’extérieur…

Mais aussi le choc, après avoir voyagé cinq semaines avec si peu de matériel (qui, pourtant, pesait déjà lourd dans mon dos…), de voir qu’en apparence chaque maison jette plus que le total de ce que j’ai transporté…

[… En écrivant ceci, je jette un œil sur le désordre encombré de mon propre appartement… Ai-je vraiment besoin de tout ça? Ciel…]

Rendu au coin de la rue, je m’avance; un des vidangeurs dit à l’autre qu’ « Il est pressé celui-là! »… Mais j’ouvre ma vitre plus grand, pour leur adresser la parole; celui qui venait de parler tend l’oreille.

« Vous suivre, c’est une leçon de vie. Merci pour votre travail, les gars! »

Il me salue de deux doits à la casquette en souriant…

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