Deuxième journée à Saigon, dimanche 25 février 2018

Ce matin, nous changeons de manière de faire: hier, nous avons dormi un peu tard et déjeuné à la toute fin du service, puis souffert de la chaleur en marchant. Là, mes apprentissages du Camino me sont revenus, et nous nous levons bien plus tôt, pour déjeuner tôt et partir avant le pic de température.

Le petit café où est servi le déjeuner est au 11e et dernier étage de notre hôtel. La vue est intéressante, sur la rivière et sur les chantiers autour (il y a partout en ville des palissades autour de terrains vagues ou de ruines…).

(Qui voit la femme étendant son linge?)

Nous partons, ce matin, sur les traces de l’enfance de Quynh. Première étape, au bout de la rue de notre hôtel: l’hôpital pédiatrique où a travaillé sa mère, après la chute, euh, la libération de Saigon.

Nous continuons vers le nord pour un bon moment. En passant sur les trottoirs qui me semblent français, Quynh me confirme que ce sont bien les trottoirs de son enfance. Donc, mon intuition était la bonne. Plus tard, je verrai un avertissement en français sur un pylône; cette intuition-là aussi était dans le mille.

Nous arrivons à un autre parc, encore vaste et beau, tout près de là où vivait la famille de Quynh pendant son enfance. Une remarque: il y a plusieurs fontaines et jeux d’eaux, mais toujours sur des terrains privés! Je n’en ai pas encore vu dans un parc.

Puis c’est le quartier de l’enfance, avec, pour commencer, l’église voisine de son école, puis l’école primaire et secondaire, puis le marché où sa grand-mère allait faire les courses chaque jour.

  

Ce marché est plus petit que celui d’hier, mais au moins aussi dense. Possiblement plus riche d’enseignements, aussi; d’autant que ma mère et moi sommes, cette fois-ci, les seuls occidentaux.

Il y a des sacs avec des phôtes de phrap…

Mais aussi de la viande non réfrigérée…

(À ce sujet, Quynh nous raconte une histoire d’horreur, disant qu’elle a entendu dire que cette viande est parfois conservée au formol! Elle ajoute que les conditions sanitaires ne sont pas idéales, ce qui est certainement l’euphémisme de la saison, et termine en disant qu’après un moment, « l’intestin s’habitue »!)

Un peu plus loin, hum… Estomac et cœurs sensibles, passez directement au paragraphe suivant, je vous prie… Un peu plus loin, dans de grands bacs, il y a des poissons vivants, dont l’eau est renouvelée constamment, puis, en-dessous ou juste à côté, des crabes, tout aussi vivants (Quynh en a rattrapé un qui s’enfuyait)  et aussi des grenouilles, attachées ensembles par des élastiques. Mais, deux ou trois étals plus loin, quelqu’un prenait les grenouilles et leur coupait la tête, puis les bouts de pattes et leur ouvrait le ventre… Chez nous, tout le processus d’abattage et de découpe des animaux servant à la nourriture humaine est caché, mais ici, il est mis en évidence. Certaines personnes qui se souviennent de Maïté et de son émission auront une petite pensée en souvenir…

Cette scène me fait repenser à une impression que j’avais eue la veille, en voulant traverser une rue parcourue par une horde incessante de scooters et de voitures, mais aussi en voyant les zones de saletés et d’immondices amoncelés: il y a une violence dans cette ville, une dureté, je ne sais pas comment mieux définir… Ça viendra peut-être…

Mais après tout, Saigon est la capitale vaincue… Euh, je veux dire la grande ville libérée, pardon…

Reste que… pour laisser là la grande Histoire et revenir à notre petit récit… Et parlant de violence: près du marché et de l’école et de l’église, la circulation est tellement intense que même la traversée de la ruelle est dangereuse! Pour prendre la direction de l’ancienne maison de la grand-mère de Quynh, je convertis Quynh et ma mère à la traversée à la romaine. Je dois dire toutefois que ça (me) prend une dose de résolution pas mal plus élevée que nulle part ailleurs! Et aussi un sens du « timing » assez particulier: un taxi va couper la voie pour tourner à gauche? Go go go, tout de suite! Et on avance sans changer de pas.

Nous arrivons à l’impasse, puis directement à la maison en question. C’est maintenant un restaurant chic! Le garçon est tout désolé de nous dire que tout est réservé pour une fête privée, mais qu’il espère nous revoir dans les prochains jours.

Je sens Quynh heureuse de ce retour, comme une réconciliation que je m’explique mal. Elle prend beaucoup de photos.

Au bout de l’impasse, une vieille dame fait mine de lui donner une tape sur le bras… J’ai l’impression qu’elle a reconnu Quynh, trente-quelques années plus tard! Ma mère me trouve énervant…

En face de l’ancienne maison, il y a des terrains fermés par des clôtures couvertes de barbelés… J’ai le sentiment que tout ça est en place depuis la guerre…

Retour par la rue Pasteur…

Puis, après un excellent dîner en ville (va falloir que je rédige un billet sur la nourriture!), ma mère fait la sieste, Quynh lit et moi j’écris. Au moins, je viens de rattraper mon retard.

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