-Le pauvre monsieur, il a perdu son père, qui s’est suicidé, il a perdu son grand-père, qui s’est suicidé aussi, il a perdu sa femme, qui a eu le cancer […] Il a aussi perdu sa jambe gauche. Il y a des gens qui perdent toutes sortes de choses…
Esquissé passé, Montréal, mercredi 23 mai 2018
-Avance, tabarnaaak!
(elle était deuxième lorsque le feu est passé au vert…)
Esquissé passé, Montréal, jeudi 17 mai 2018
-Si on prescrit des pilules, c’est qu’on veut se débarrasser des patients!
(délicieux double sens…)
Esquissé passé, Montréal, jeudi 17 mai 2018
-Je me rends compte que le repos […] c’est comme de l’énergie que tu mets pas dans l’aspirateur!
Critique de concert: Yuja Wang, Maison symphonique, mardi 15 mai 2018
Je la connaissais par ses vidéos, que me montrait souvent Eugénie D. J’avais vu les robes courtes, la virtuosité… Vu aussi la version décevante du Grand Tango avec un grand violoncelliste français, qui donnait plutôt l’impression d’un rendez-vous manqué, quelle qu’en soit la raison. Cela dit, je ne savais pas vraiment à quoi m’attendre.
Elle est arrivée en robe verte à paillettes, moulante, longue, bras et dos dénudés… Elle a vraiment une très belle silhouette. Elle sourit parcimonieusement, lorsqu’elle salue. Ses chaussures vertigineuses, des Louboutin, sont dorées. Je constate leur usure, car le rouge est parti là où elle appuie sur la pédale du piano…
Rachmaninov, pour commencer. Et même, une pièce qui me renvoie à mon adolescence… Je crois que c’était feue Isabelle Fleurant qui la jouait, lorsque nous étions en secondaire V.
Enfin, bref, tout semble facile; ça, je le « savais » déjà, par les vidéos. Ce que je découvre d’autre, c’est le contrôle soigné des textures, des plans sonores, le suivi attentif, magistral, même, des voix… C’est comme si la musique était sculptée, ciselée… Il y a un moment où son Rachmaninov fait penser à Debussy…
Elle joue avec intelligence, au sens de compréhension profonde de ce qu’elle fait et de ce qu’elle veut faire entendre. Je ne vois pas souvent son visage, placé d’où je suis (j’ai dit que je voyais sa semelle), mais je constate qu’elle ne sourit pratiquement que lorsqu’elle salue. Autrement, elle est dans sa musique. Et plus le concert avance, plus elle y est. Son Scriabine évoque Liszt…
Il y a une forme de lyrisme, un peu réservé mais constant, qui me fascine plus qu’il ne me charme. Par contre, je suis vraiment soufflé par son contrôle des voix. Tantôt, je parlais de sculpture, mais c’est encore plus que ça; voyons, comment dire…
L’autre jour, les feuilles étaient sorties et la haie est devenue verte probablement d’un coup. Ce matin, c’est l’arbuste sur St-Denis qui était en fleurs, comme la plate-bande devant chez mon élève… La voilà, la comparaison: Yuja Wang est une jardinière-fleuriste magicienne qui, comme le printemps, fait apparaître des fleurs de musique ici et là. C’est évident aussi dans les trois Études de Ligeti.
Après la pause, elle revient en robe jaune courte, moulante, qui ne laisse plus deviner grand-chose. Je pense aux commentaires de Gaël qui me dit parfois ce que c’est que d’être une femme dans l’œil du public… Et me demande ce que ça représente pour elle, Yuja Wang? De toute évidence, elle doit s’entraîner physiquement, pas mal beaucoup, pour être sculptée comme ça… Et oui, je parle de sculpture, encore… Elle a de très belles jambes, faut bien le dire…
Mais ce n’est pas tout. Car il y a aussi son Prokofief, qui est délicieusement acide, au point d’évoquer Chostakovitch, par moments. Est-ce d’avoir vécu sous une dictature totalitaire? Toujours est-il que ses musique russes sont très convaincantes.
Puis, c’est le moment des rappels. Elle nous en donne quatre. Et là, là, elle est encore plus dans sa musique. Le premier, je le ne connaissais pas. Schubert, peut-être? Très beau. Il y a ses variations sur le Rondo Alla Turca de Mozart, variations qui nous font entendre deux siècles de musique pour piano, depuis Lizst, Chopin, Rachmaninov jusqu’à James P. Johnson, puis des variations tout aussi époustouflantes sur un air de Carmen… Elle est de plus en plus « dedans », de plus en plus libre et n’a plus rien à prouver.
Puis elle revient une dernière fois et nous joue un arrangement d’un air de Handel. Et là, là, ça devient, à mon sens, carrément bouleversant. Magnifique, émouvant. Nous n’avons plus affaire à une excellente pianiste mais bien à une grande musicienne, à mon humble avis.
Un jour, peut-être, elle aura vieilli (bon, elle a passé l’âge fatidique de Jimi Hendrix, Jim Morrison, Janis Joplin et Amy Winehouse, mais pas de beaucoup), un jour peut-être ses chairs seront flasques et ses jambes ornées de cellulite et alors peut-être ne fera-t-elle plus ses concerts en robes archi-moulantes et passablement diaphanes… Mais ce jour-là, si je suis encore de ce monde, je crois que je retournerai l’écouter, en espérant revivre un moment comme son Handel. Car c’est ça, la magie des concerts.
Elle est revenue saluer une dernière fois et est ressortie en tortillant de la croupe dans sa robe moulante et diaphane… Avec des talons pareils, probablement impossible de faire autrement…
Bouquet d’Esquissé passés, Montréal, avril-mai 2018
-Dans un dépanneur de merde!
[il rentrait une palette entière de bouteilles d’eau attachées par six; Plateau Mont-Royal, vendredi 27 avril 2018]
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-Lui y pense nonnon, tsé, moi j’dis heyhey!
[au cellulaire, mardi 1er mai 2018]
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-J’ai pas vraiment l’temps mais… si j’ai des vies parallèles…
[vendredi 4 mai 2018]
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-Voulez-vous autre chose avec votre soupe? Un sandwich? De l’eau pour vos pilules?
[Ville-Émard, dimanche 13 mai 2018]