Nájera, soir du 26 mai 2017

Les derniers km vers Nájera ont vraiment été difficiles; interminables. Puis je me suis enfin mis en sandales, puis il a plu; bottes de nouveau.

Très bon souper, en compagnie (tardive) de Bernhard et Jürgen.

Dans ma chambre, trois sud-coréens, dont deux jeunes hommes qui ont des ampoules à faire peur et une dame âgée, mariée à un américain, qui est toute contente de pouvoir échanger quelques mots en français.

Tonnere, encore… Fait rien, demain, on va encore dépasser les 30°.

English digest: never ending walk, good meal and good german chaps, south koreans and a thunderstorm.

De Logrono à Najera (jour 8, 26 mai 2017)

Me retrouver en tête-à-tête avec le soleil, le vent, la poussière et les cailloux de la Rioja, avec le chant des oiseaux et le vol des papillons, avec les odeurs des champs et les vents qui soufflent ou pas, avec la cadence de la marche, avec la longueur des étapes, avec les pauses, la gestion de l’eau, la recherche du gîte, du café d’encouragement, de la bière de récompense et du souper…

Marché 31 km, aujourd’hui; je crois que c’est ma plus longue étape, en distance.

Ça a fait une semaine que je suis parti, ce matin. Vendredi dernier, pour me mettre en chemin, j’ai laissé derrière moi Alain et Mixu; ce matin, j’ai laissé Tina. Je me demande qui, ou ce que, je laisserai la semaine prochaine. Mais bon, c’est très rhétorique comme question, nous verrons bien rendus là.

Marché la dernière heure (en gros, la descente vers Najera) en compagnie de Marie, une Française sympa qui fait le Camino depuis Le Puy en Velay, en France, par petits morceaux depuis quelques années. Elle finit son tronçon de cette année, ce soir, ici même. C’était agréable et rigolo.

English digest: walked for many kms under a warm sun and in the dust. Enjoyed it.

Hoala, Tina (vendredi 26 mai 2017)

Ce matin, dernier déjeuner avec Tina.

English digest: It all became obvious, just before we left the room, this morning, and still it took me a few moments before I dared say it… But I saw it made as much sense to you, when I finally said it. It made everything clear, the care for one another, the understandings and the misunderstandings, the complicity, that precise kind of intimacy and of affection, that ease of going together… Even though we were total strangers the second before we started talking.

Buon Camino, meine neue kleine schwester, mit grosse liebe von ihr neue alt brudder,

Nicolas

p.s. I hope it makes sense, neither Jürgen nor Bernie (nor Jean-Philippe) are here to help me with my german.

P.p.s. the first café in Navarete is worth stopping early in that village.

Cadeaux sur le Camino

J’ai oublié, hier, de parler de Pepe, qui nous a offert un petit verre de Pacharan, au passage… Je l’ai un peu vexé, je crois, lorsque j’ai parlé du Pacharan pour les touristes et du Patxaran artisanal… Pas grave, son Nespresso était tellement cher qu’il pouvait bien faire un petit cadeau.

  1. C’est pour ça qu’il fait la gueule sur la photo, je crois…

    Puis, ce matin, simple cadeau de quatre tranches de tomates avec la pointe de tortilla con patatas. Miam! Et, comme il n’y avait pas de poivre, la patronne est remontée chez elle pour m’en amener! Muchas gracias!

De Torres del Rio à Logrono (jour 7, 25 mai 2017)

Bon; je ne devrais pas redire que si bla bla bla… Reste que je suis très content d’avoir une semaine de marche de faite, au moment où je serais juste arrivé en France, bon!

Nous avons dormi dans un dortoir à lits superposés, une dizaine de lits. Le mien grinçait terriblement. Tina et Daniel disent qu’ils ont très bien dormi, moi,  c’était moyen.

Bon; après le petit déjeuner pas donné, nous sommes partis un peu après 8h. Il faisait encore frais, mais ça n’a pas duré. Il faisait très beau, mais ça, oui, ça a duré. Disons que la météo est imcomparable avec celle de la semaine dernière.

L’étape de la journée était la dernière en Navarre, jusqu’à notre entrée en Rioja. Ça me fait drôle, je dois dire… Parce que, même si la Navarre n’est pas un État-nation au sens moderne du terme, même si c’est un « ancien » pays au sens des frontières juridiques, c’est la première fois que je traverse un « pays » en entier, à pied.

Je ne compterai pas la fois où j’ai fait le tour du Vatican, un après-midi… De toute manière, je ne l’ai justement pas traversé.

Il restait quelques petites montées, quelques petites descentes, parfois raides, mais tellement moins longues… Quelques bouts sur le plat, entre les vignes et les oliviers, et parfois les bois de pins… Le paysage a beaucoup changé, déjà, en une semaine, depuis les alpages. Il n’y a plus d’élevage depuis déjà deux ou trois jours. Le paysage me fait beaucoup penser au nord du Tarn, pour tout dire, et il y a même eu un village en haut d’une butte, Cirauqui (dans l’étape d’hier), qui m’a donné une étrange nostalgie de Cordes, à l’époque où je montais la grand rue en coupant par la pente la plus raide,  autour de la Barbacane.

La seule bourgade un tant soit peu importante sur le trajet était Viana, dont le centre ancien est fort joli. Nous avons croisé, de nouveau, Jürgen et Bernhard, accompagnés cette fois-ci d’une jeune Ukrainienne (si j’ai bien compris) qui faisait du yoga restaurateur sur la place centrale du village (pensée pour… bien du monde, évidemment, mais Gaël en particulier, je dois dire).

Après le café et la collation coutumiers, nous repartons vers Logrono que nous atteignons environ deux heures plus tard. Les abords de la ville ne sont vraiment pas terribles, industriels et commerciaux, mais, encore une fois, le centre est charmant. Avantage non négligeable pour Tina: c’est la capitale de la Rioja, la fameuse région vinicole d’Espagne.

… D’ailleurs, Tina était en train de prendre des photos de la ville à travers les vignes lorsque Jürgen, Bernhard et la jeune fille nous ont rejoints. Jürgen s’est approché de Tina en douce et a gentiment secoué son sac à dos. Joli moment intangible entre eux.

Le trio nous dépasse, nous arrivons en ville et commençons notre recherche de logement… pour tomber, dans la deuxième auberge, sur… Ben oui, J et B. Nous continuons tout de même, jusqu’à une troisième auberge où nous nous offrons encore le luxe d’une chambre double, lits jumeaux. La douche est excellente, et il n’y a pas de minuterie ni sur le robinet, ni sur la lumière. Joie!

Il ne restait que deux bières à la réception. Je pars en chercher à une épicerie pas trop loin. Rendu là, je me dis qu’un petit quelque chose pour fêter notre semaine serait agréable, et je pense au superbe jambon que j’avais mangé lors du voyage avec ma mère. J’arrive au comptoir de charcuterie et  commence à expliquer, dans mon espagnol archi-laborieux, ce que je cherche et pourrais-je goûter s’il-vous-plaît.

La vendeuse trouve le jambon, ou quelque chose de semblable, me donne un échantillon, et oui, c’est bon, huit tranches très minces je vous prie. Elle coupe, cherche le code pour le prix mais ne le trouve pas. Elle prend un porte-étiquette sur le bord du comptoir mais l’échappe de mon côté. Je le remonte mais les étiquettes ont disparu derrière la boîte de bois qui fait présentoir de plein de trucs. Elle fait le tour et veut la récupérer, pour l’aider je soulève la boîte et… Bruit de verre cassé, liquide sur mes pieds, odeur de vin… Je viens de soulever une boîte qui servait d’appui à la précédente et qui contenait trois bouteilles de vin rouge de la Rioja, deux sont tombées et cassées… J’ai du verre dans la sandale et du vin sur les pieds… La vendeuse me passe un papier pour m’essuyer, retrouve finalement le prix du jambon et me fait l’étiquette… en me souhaitant un buon camino… et en me remerciant d’avoir voulu l’aider. Elle ne m’a rien facturé.

J’ajoute des olives aux anchois puis pars raconter mon aventure…

Torres del Rio, ajout (24 mai 2017)

J’ai oublié de mentionner que nous avons revu Daniel, hier soir, à l’albergue de Torres del Rio. Il a déjà changé, depuis le départ; moins chic, plus vrai, si j’ose dire. J’ai appris son âge, 38 ans, et ça m’a donné un choc; il a un petit je-ne-sais-quoi d’adolescent…

D’Iratxe à Torres del Rio (jour 6, 24 mai 2017)

Ce matin, j’ai écrit un petit mot en passant par Azketa. Ensuite, ben, nous sommes partis et avons marché. Pour un bout, ça allait bien, puis il y a eu plus de soleil et moins d’ombre. Puis de plus en plus de soleil et de moins en moins d’ombre.

Ça peut avoir l’air banal, ce ne l’est pas du tout.

Ça a d’ailleurs donné lieu à une vraie friction entre Tina et moi, lorsque j’ai pensé qu’elle me tendait sa bouteille d’eau. Elle a réagi en me disant que j’avais ma propre réserve d’eau, ce qui était vrai. Mais sur le coup, j’ai fait une tête…

Elle m’en a reparlé, plus tard, rendus à l’étape, en espérant que les choses soient claires. J’avais repensé, sur le coup, qu’au fond elle avait raison, l’eau est une ressource précieuse dans ce genre de voyage et j’aurais intérêt à prendre meilleur soin de mes propres réserves… puis j’avais oublié l’incident.

J’ai apprécié qu’elle revienne dessus pour éclaircir les choses. Je le prends comme ma deuxième leçon du Camino pour la journée.

Troisième leçon: j’ai répété une fois de trop que, si je n’avais pas ceci et cela, je serais en train de prendre l’avion maintenant… La leçon? Vivre au présent plutôt que ressasser ce qui aurait pu être.

Bon; je vais tâcher de la mettre dans mon bonnet.

À part ça, croisé deux Québécoises aujourd’hui, Marielle, une quinqua ou sexagénaire, à Azketa, qui était partie de Saint-Jean-Pied-de-Port le 14 puis a été malade et a perdu quelques jours et reprend doucement le chemin… Elle était reconnaissante de toute l’aide qu’elle a reçu. Aussi, Véronique, croisée ici à Torres del Rio, à l’albergue des pèlerins.  Nous avons entendu parler d’elle lorsque nous avons, pour la troisème fois, rencontré Herrn Jürgen et Bernie, à Los Arcos; ils disaient avoir rencontré une Canadienne (…) qui voulait faire le Camino en 28 jours. En étendant la lessive devant l’albergue, tantôt, j’ai vu une grande blonde mi-quarantaine qui venait vérifier son linge. J’ai dit: « C’est sec? » » Et elle a répondu « Oui »; quelques secondes plus tard, je l’ai entendue jaser en anglais avec d’autres voyageurs; je me suis dit que c’était elle.

Elle est beaucoup plus entraînée que moi, ancienne triathlète… Demain, elle va faire une étape et demie. Respect et encouragements!

English digest: it was sunny and warm. Think more about water.

Azketa, 24 mai 2017

Hier soir et ce matin, c’était le contraire de la veille: pas de wifi, mais une hôtesse charmante, qui a même pris le temps et la peine, ce matin, de tenter d’appeler le prochain gîte qui nous intéressait (site web pas à jour, le gîte n’existe plus!) et nous a souhaité « Alegria! »

Nous venons de finir de déjeuner dans le village voisin, devant cette vue.

Nous repartons.

Puenta-la-Reina – Iratxe (5e étape, 23 mai 2017)

Hier, nous n’avons eu qu’une aventure, mais aujourd’hui, plusieurs!

Il y a d’abord eu le départ de l’albergue de Puente la Reina. Le monsieur au comptoir qui fout Tina dehors à huit heures moins cinq… moi, il ne me fout pas dehors, parce que je suis aux toilettes. En revenant, je prends mon temps pour enlever mon chandail et le mettre dans mon sac avant de sortir, il ne m’adresse pas un regard. Je rejoins Tina à la première table dehors; nous finissons de nous préparer pour partir. Le même monsieur sort à son tour, ramasse une grande toile de plastique pratiquement sous notre nez, toujours sans un regard… Dans le silence, je dis à Tina: « Disappointing! » En repassant, le monsieur nous souhaite finalement « Good bye ». Je dis à Tina que je ne sais pas si le monsieur m’a entendu, elle répond que ce serait probablement une bonne affaire…

Note: il y a des endroits, comme ça, où les gens sont tout sourires tant qu’il nous reste quelque chose à payer. Après, c’est comme si nous n’étions que du bétail. Oui, c’est décevant.

Seconde aventure de la journée: le gazpacho! Je l’ai déjà dite, sur le coup; voire l’article écrit depuis Lorca.

Troisième aventure: la fontaine à vin d’Irache. Oui, il y a une fontaine qui sert de l’eau du côté droit et du vin du côté gauche. C’est un cadeau des vignerons d’Irache, en souvenir de l’époque où les moines payaient la traite aux pèlerins en leur servant un petit coup de vin. Il y a quelques messages, comme de boire raisonnablement s’il-vous-plaît; de, si on veut emporter du vin en quantité, l’acheter, s’il-vous-plaît, et aussi qu’il y a une caméra qui permet de voir, sur le net, qui est en train de prendre du vin… Notre étape était trop improvisée pour que je puisse avertir de la chose, et il n’y avait pas de wifi sur place…

reste que… Tout comme le passage des ports de Cize, entre Saint-Jean-Pied-de-Port et Roncevaux, tout comme la nuit à l’auberge refuge de Roncesvalles, tout comme le passage près de la statue des pèlerins entre la vallée de Pampelune et la plaine suivante, boire un peu de vin à cette fontaine nous donne une impression de rite de passage.

Nous n’avons pas eu le goût de rester à Estella… Après deux téléphones laborieux, j’ai fini par trouver une chambre pour deux dans un camping à Iratxe (noter la différence d’orthographe entre la version espagnole et la basque). Nous sommes, presque seuls, dans une petite chambre à lits jumeaux (pour une fois), qui sentent l’humidité, dans un camping qui commence sa saison. En arrivant, la dame à l’accueil nous a parlé de la petite épicerie où nous pourrions trouver de tout, juste à côté. Ça tombe bien, Tina veut acheter la traditionnelle bière de fin d’étape. Nous sortons et entrons par la porte d’à côté… pour trouver la réceptionniste qui est passée par la porte intérieure et qui nous ouvre, en courant presque vers le fond de l’épicerie pour allumer les lumières.

Il fait beau, il fait chaud, la bière est bonne et les douches sont équipées de quatre crochets et d’un petit banc faisant tablette. Youhou!

P.s. Tina est allée commander à souper. Elle me raconte que le serveur lui a carrément montré une assiette de chaque plat disponible… Cela dit, comme il n’y en avait que trois, ce n’était pas difficile…

English digest: some people are bad, but gazpacho, wine and beer can be very good. It was hot and we sweat a lot, but we had fun.