Hier, la journée a commencé de bien étrange façon: la recherche d’un endroit où déjeuner! Le premier resto était trop plein, il n’y avait plus de place; le second, hors de la ville, était trop vide, il n’y avait pas de cuisinier! Le troisième, un club de golf, ben, ça a marché. Nous avons tout de même passé une heure à chercher!
Puis nous sommes rentrés, Pendant que B. partait prendre une marche avec L., j’ai pratiqué un tout petit peu et préparé un peu quoi dire, tantôt.
Puis B. est venue me chercher et nous sommes allés à la résidence pour personnes atteintes d’une déficience ou d’une maladie mentale. Le journaliste est arrivé peu après. Pendant son entrevue, il est revenu sur le fait de comment ça se pouvait que je sois venu d’outre-Atlantique pour jouer ici, à Hückeswagen?!? Je crois qu’il pensait que c’était une manière de vacances aux frais de la princesse, pour moi, et qu’il n’en est pas revenu de découvrir que j’avais pratiqué chaque jour!
Puis les résidents de la place sont arrivés, en ordre dispersé. J’ai été averti qu’une jeune femme, attachée dans sa chaise roulante au premier rang, pourrait avoir de la misère si c’était trop fort…
Présentation par B., qui m’a averti qu’elle allait dire totalement autre chose que ce que j’avais envisagé. Je lui fais totalement confiance! Je devine l’essentiel de son message. Puis bon, je joue. Gamme et arpège descendants du début du Prélude de la Troisième Suite. La jeune femme aux oreilles sensibles crie, je radoucis le son, rien à faire… Une aide soignante vient la sortir en s’excusant. La femme qui accompagnait la première sort aussi, par sympathie, je crois. Regard vers B., qui ne bronche pas. Je continue.
La dame âgée juste devant moi a dans le compartiment de sa marchette une poupée de petite fille. Elle la prend et l’assied sur la tablette de sa marchette, en position pour m’écouter. Ouf! Le courant passe. Je continue. Je vois des hochements de tête, J’enchaîne les mouvements sans reprise.
Après la Suite, réaction très positive. B. demande si je continue et propose juste un autre morceau. Évidemment, je fais le Prélude de la première Suite. Applaudissements encore, puis signe de tête: c’est assez. Je range mon violoncelle. Une autre femme attachée à sa chaise, plus au fond, demande pourquoi la musique est déjà finie? La dame à la poupée me demande si je reste à Hückeswagen. Non. Mais alors, quand allez-vous revenir? Je lui promets que, quand je reviendrai à Hückeswagen, je reviendrai jouer pour eux. Le personnel est content, B. aussi.
Nous partons pour une grande marche dans la campagne, avec B., R., J., L. et A.R. Le but de la marche: une maison qui fait jardin ouvert, une autre initiative citoyenne du coin. Nous arrivons près d’une jolie villa avec un très beau jardin anglais qui domine le village voisin. Il y a un petit aérodrome pas loin et un avion passe, tirant un planeur. Le câble largué, le planeur tourne en silence.
Je rejoins Lars, assis sur un banc en haut du jardin. Nous voyons Hückeswagen au loin. Je me suis souvenu, au début de la marche, que c’était l’anniversaire de ma mère, aujourd’hui. L. me suggère de l’appeler, maintenant que c’est une heure décente au Québec. Je lui explique que je marche généralement en wifi, vu le prix de nos appels cellulaires au Canada… Il m’offre de partager la connexion avec son cellulaire. Merci beaucoup! J’appelle…
Quand nous redescendons, les autres sont déjà attablés. Nous passons nous servir des gâteaux et du café ou de l’eau. Les gâteaux sont excellents! J’en fais le compliment à une des femmes qui sert les visiteurs, en soulignant que c’est l’anniversaire de ma mère et que c’est moi qui mange ces superbes gâteaux!
B. suggère alors qu’ils chantent Joyeux anniversaire en allemand pour ma mère. Je rappelle, ils commencent, pile sur la même note sans même s’être consultés, tous les quatre (A.R. est absente à ce moment-là). Ma mère est touchée, je suis ému. Je prends un petit moment pour les présenter par vidéo.
Sur le chemin du retour, je remercie B. Elle avait entendu parler de ces jardins ouverts, comme les maisons ouvertes de Kulturräume, et touvait que ça ferait une belle conclusion à cette semaine. Je suis bien d’accord. Je crois que je vais prendre un autre billet pour parler d’elle, j’ai appris beaucoup de choses pendant la semaine.
Dernier cadeau, en arrivant au village: une femme salue B. et lui parle en me désignant en disant plusieurs fois « morgen »… Je finis par comprendre qu’elle m’entendait pratiquer les matins et qu’elle aimait ces débuts de journées. Elle habite juste au-dessus du salon de coiffure, pile en face du salon où je me trouve en ce moment pour écrire… Merci, madame!
Retour, souper à la pizzeria pas loin (très bonne pizza mais évitez le vin rouge maison!), nuit puis matin… Et c’est déjà mon dernier déjeuner ici. Dernière conversation, dernière marche vers le travail, dernier bilan…
Fondamentalement, le projet de Kulturräume, c’est de rendre les gens heureux. Ça a marché. Merci, merci beaucoup! Au revoir, B.
… Bon; A.R. vient me chercher pour me reconduire à Cologne dans une heure… Faudrait bien que je fasse mes bagages… Et s’il me reste du temps, jouer quelques notes pour la voisine d’en face?